Bientôt viendront les jours sans toi – David Trueba

Tierra de Campos, 2017. Traduit de l’espagnol par Anne Plantagenet. Éditions Flammarion, 5 septembre 2018 ; 391 p.

Ma chronique (rentrée automne 2018, 2) :

Un roman en forme d’autobiographie, celle de David Campos, dit Mosca, un chanteur espagnol à succès né en 1970. Un personnage fictif, mais qui aurait pu exister. Un roman ambitieux, celui d’une époque, d’une génération, d’un pays ?

Daniel a quarante ans. Il vit à Madrid, sa vie personnelle cahote, sa carrière professionnelle a du mal à rebondir. Son père est mort il y a un an mais il décide soudain de rapatrier son corps dans son village natal, pour qu’il y soit enterré, comme il le souhaitait. Pendant les heures de route vers le Tierra de Campos, cette province au nord-ouest de l’Espagne, il laisse ses souvenirs se déployer. L’occasion « d’assembler, à travers le chaos / les pièces du puzzle qui me formaient. », comme il a pu l’écrire un jour dans une chanson.

Un roman construit comme un vinyl, face A le voyage, face B le village, avec sa vie dedans, en épisodes ponctués de paroles de ses chansons. Sa scolarité dans une rude école catholique, comme tous ceux de son âge, la maladie de sa mère, ses premiers cours de guitare, ses meilleurs potes, ses premiers émois, la création de son groupe de musique au lycée, Las Moscas (les mouches), les relations conflictuelles avec son père, un homme rigide, haut en couleurs.

« La main de mon père avait passé ses vingt premières années à labourer des champs et à faire la guerre ; la mienne, pendant cette même période de vie, avait servi à me branler et à jouer de la guitare. »

David Trueba a une écriture élégante, jamais pesante ni pompeuse, qui suscite autant d’intérêts en racontant différents processus créatifs ou une soirée de biture. J’ai pensé à Maintenant ou Jamais de Joseph O’Connor, et aussi à Jonathan Coe, mais en version espagnole. Des personnages attachants, beaucoup d’humour, de la finesse. L’amitié entre Dani, Gus et Animal est vraiment stimulante. Si le temps qui passe et les mutations de soi nous détournent de nos idéaux de jeunesse, faut-il rectifier le cap ? Le titre français est tiré d’une parole de chanson, « Bientôt viendront les jours sans toi / Triste calendrier, dans l’avenir », la mélancolie pour les absents est là, d’accord, mais le titre original est bien plus riche de sens : Tierra de Campos. Le terreau du passé e(s)t celui de l’avenir.

Cette histoire m’a parlé. Et si le dernier tiers n’avait pas été, à mon goût, un peu plus faible que le reste, ce livre aurait été un coup de coeur. La musique, l’écriture, cela m’a rappelé ma propre adolescence et mes premiers grands élans.

« Je n’ai pas l’habitude de prendre des notes, car je crois seulement aux idées qui survivent à l’oubli. »

PS : Ce roman ne paraitra que dans deux semaines. Habituellement, je ne publie mes chroniques de rentrée littéraire qu’à la sortie du livre, le jour même, la veille parfois. Mais ici, il y a un timing Babelio à respecter. Cqfd. Merci aux éditions Flammarion pour cet envoi !

  5 comments for “Bientôt viendront les jours sans toi – David Trueba

  1. 18 août 2018 à 17 h 38 min

    Toujours un plaisir de lire tes critiques sur les livres. J’aime cette période de rentrée littéraire. On peut dénicher ici et là des pépites. Excellente soirée à toi et bises bretonnes 🙂

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    • 20 août 2018 à 11 h 43 min

      Merci Frédéric, oui je suis comme toi, j’aime les découvertes. Le côté plus désagréable de ces périodes de rentrée c’est parfois le battage médiatique pour certains titres… Mais bon. On apprend à ne plus y faire attention 😀 Bonne semaine à toi, bises

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      • 21 août 2018 à 17 h 40 min

        oh oui ça c’est vrai que c’est lourd ce battage médiatique sur de pseudos écrivains peoples qui n’ont de talent que le nom; pendant ce temps d’autres écrivains talentueux attendent d’être invités à la grande librairie 😉 (même si c’est une belle émission quand même) belle semaine à toi, Bises bretonnes ensoleillées 🙂

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  2. 18 août 2018 à 17 h 58 min

    J’avais très envie de découvrir cet auteur. O’Connor et Jonathan Coe sont de bonnes références pour moi. Tu valides mon envie.

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    • 20 août 2018 à 11 h 44 min

      Heureuse d’avoir étayé ton envie ! J’ai vraiment passé de très très bons moments avec ce roman.

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