Instructions for a Heatwave, 2013. Traduit de l’anglais (Irlande) par Michèle Valencia. Éditions Belfond, « Littérature étrangère », 2014.
Ma chronique :
Juillet 1976, l’été de la canicule. Dans la banlieue de Londres un matin, Robert disparaît. La journée avait pourtant commencé comme toutes les autres depuis sa retraite, au côté de son épouse Gretta. Mais ce matin-là, Robert sort pour faire une course. Et il ne revient pas.
Commence alors pour la famille Riordan (Gretta, l’épouse, d’origine irlandaise comme Robert, et leurs trois enfants, Michael Francis l’aîné, enseignant, marié et père de deux enfants, Monica la cadette, (re)mariée, et Aoife la benjamine émigrée aux Etats-Unis) l’épreuve de l’inquiétude, des recherches, de l’attente, des interrogations. L’épreuve des retrouvailles également. Avec les autres, avec son passé ; avec soi-même.
Car on découvre bien vite, au détour des existences de chacun des personnages, et des bribes que tous livrent d’eux, de leurs souvenirs, de l’enfance, du temps passé ensemble avant – avant les brouilles, les mariages, les enfants, l’envol -, que derrière les façades plus ou moins lisses et convenues se cachent des maelstroms d’espérances et de regrets, d’incompréhension, de rêves, de brisures, de détresse ; et aussi de sombres puits pavés de secrets.
La disparition du père agit sur sa famille comme un déclencheur, le feu aux poudres des faux-semblants et des non-dits.
Dans l’intrigue, un seul bémol à mon sens : le gros rebondissement vers la fin du livre, qui est quand même plutôt invraisemblable. Mais sinon, j’ai tout aimé dans ce roman. La belle écriture fluide et évocatrice, la pudeur et la retenue dans certains passages délicats, les personnages que l’on découvre à mesure par leurs voix propres puis par celles des autres. Ils sont dépeints avec beaucoup de finesse et pas mal de cruauté, tantôt horripilants, tantôt attachants ; toujours complexes, finalement. On voit chaque personnage par les yeux de tous les autres, y compris Robert, et cela donne une profondeur inattendue au récit.
Sous nos yeux, par petites touches intelligentes et sensibles, se dessine à mesure une fresque familiale complexe, et le tout tient en quatre jours de temps. C’est brillant. J’ai aimé le rythme bien dosé entre le présent et les souvenirs, et la narration qui tient en haleine jusqu’au bout. J’ai été touchée par Aoife, sa personnalité heurtée et son prénom gaélique que seule sa mère arrive correctement à prononcer (entre Eve, Eva et Iffie si j’ai bien compris) et le fait qu’à aucun moment Maggie O’Farrell ne juge ses personnages. Sans parti-pris, l’auteure nous permet de nous construire une opinion, puis c’est à nous de voir ; et de juger, pourquoi pas, si le coeur nous en dit…
Maggie O’Farrell aborde (j’évoque tout cela pèle-mêle) la condition féminine, le mariage et la conception, le désir ou non d’enfant, l’amour, la passion, la réussite professionnelle, la place de soi dans le monde et par rapport aux parents et à la famille, le poids du passé et des convenances, la religion, la trahison, l’abandon, les Irlandais en Angleterre, l’exil, le deuil, la souffrance et les secrets qui pèsent sur les générations suivantes.
C’est le sixième et le plus récent des romans de Maggie O’Farrell (tous ses romans sont traduits en français). Pour le moment j’en ai lu quatre, et je pense que celui-ci est mon préféré (« Quand tu es parti » est superbe aussi).
En un mot, j’ai vraiment adoré cette lecture et je la conseille vivement.
J’ai beaucoup aimé ce roman aussi. Le seul que je n’ai pas lu est qui est dans ma PAL est « Quand tu es parti ». Faut que je m’y colle. J’ai hâte d’en voir paraître un nouveau aussi.
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Clairement, j’attends le prochain avec impatience !
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Ta chronique donne vraiment envie de le lire!
J’ai lu « Quand tu es parti » et j’avais beaucoup aimé. Je pense que celui-ci me plaira également. Merci!
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Heureuse que cette chronique fonctionne ! Car c’est vraiment un livre à découvrir. Il te plaira ^_^
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