Éditions La Peuplade, février 2020 ; 224 p.
★★★★★★★★★☆
Mon avis :
« J’ai l’automne à l’envers. En dedans au lieu d’en dehors. Humide, tiède dans le creux des joues. Du vent qui craque dans la cage thoracique.
C’est octobre.
Ma mère est morte et j’ai pas encore pleuré. »
Le corps de sa mère a été retrouvé dans le St Laurent aux pieds de sa maison, et la narratrice retourne en Gaspésie pour l’enterrer. Ce retour et cette perte exposent à nu le vide fondateur qu’elle a en elle. « Y’a toujours quelque chose qui brise plus creux ou qui me pousse à m’enfuir ». Quand la mer est haute, les empreintes de nos pas disparaissent et on peut se persuader que l’on n’a pas de pieds. Depuis longtemps elle courrait pour toujours rester à marée haute, mais l’océan a disparu et la voici fauchée en plein soi. Le trou dans son ventre nourri à la rage contre cette mère qui n’a jamais pu rester en place ni être là.
Mais tandis qu’elle vide la maison maternelle, elle va découvrir des cahiers écrits par sa grand-mère. Une femme qu’elle n’a pas connue, morte juste avant qu’elle ne vienne au monde. Des cahiers écrits de 1968, année de la naissance de sa mère, à 1992, celle de sa naissance à elle. Une grand-mère venue d’Islande, dont les mots vont amorcer un voyage. Un voyage qui dévoile ces femmes qui l’ont précédée et qui l’ont faite, aussi. « Je suis les femmes devant moi ». Suivre et être, la narratrice va essayer de trouver sa place et son chemin.
Il y a un grand souffle dans ces pages. Comme un envol, un air vivant qui te coupe le souffle et pique les yeux. J’ai aimé lire Les falaises et il me trotte encore souvent en tête depuis que je l’ai terminé il y a quelques semaines. Se réapproprier son passé pour pouvoir en guérir. Dans ce premier roman de femmes et de résilience, la voix inspirée de Virginie DeChaplain frappe par sa poésie un peu rugueuse qui emporte en émotions. Encore une belle découverte des éditions la Peuplade !
« Des fois j’aimerais ça me rappeler des choses que je me rappelle pas. Comme ma naissance. La première chose que j’ai vue. La première chose qui m’a fait rire. Qui m’a fait pleurer pour vrai. La première fois que j’ai eu mal. J’aimerais aussi avoir pris une photo mentale de moi pendant des moments importants pour pouvoir me les rappeler quand je vais être vieille. Je prends pas la peine de me souvenir de moi. De quoi j’avais l’air en dedans quand je suis tombée en amour. À quel âge j’ai eu peur de mourir pour la première fois. Et toutes les autres. Les fois où je me suis perdue, les fois où je suis partie, celles où j’aurais voulu rester. »
L’écriture a m’air très rythmée, presque envoûtante 🙂
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Oui, l’écriture a vraiment quelque chose, c’est difficile de le transmettre 🙂 Et ça reste, après la lecture.
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Tu as réussi 😉
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Je vais certainement le lire. Merci Hélène pour tes mots si beaux sur ce livre.
Bises
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Merci Eveline, ravie que ce billet t’ai plu 🙂 A bientôt, bises 😘
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j’aime bien les extraits et ta chronique bien sûr alors noté 🙂
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Merci beaucoup 🙂 Bises
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J’ai tenté de le lire lorsqu’il est paru ici. Mais ton billet, là!
Zut… Tu peux me dire pourquoi je l’ai abandonné?
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Hihi, pas le bon moment, ou bien l’écriture qui ne te va pas, tout simplement, sa musique qui te serait désaccordée. Merci pour ton retour ♥
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Un giga coup de coeur pour l’écriture qui a vraiment « une voix » particulière, et pour le thème de la maternité (surtout les parties du journal)
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Ah oui, quel roman splendide, La peuplade, c’est une mine d’or. As tu lu les collectionneurs d’images ?
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Non pas encore, mais il est dans ma wish list de Noël – et on m’a d’ores et déjà soufflé dans l’oreillette qu’il sera sous le sapin 🥳🤩
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