Infinis – John Banville

The Infinities, 2009. Traduit de l’Anglais (Irlande) par Pierre-Emmanuel Dauzat. Éditions Robert Laffont, 2011 – réédition en poche, Pavillons poche, 2022 ; 367 p.

★★★★★★★★★☆

Mon avis (Mémoires d’acajou, 2):

Infinis est une histoire gigogne, où toutes les boites auraient été laissées ouvertes pendant l’imbrication. Passer de l’une à l’autre donne parfois le tournis, mais John Banville excelle dans les chassés croisés et les changements de focus. Sa plume est espiègle et toujours inspirée, en plus d’avoir de la profondeur et du style.

Adam Godley se meurt à l’étage de sa grande maison, après une attaque. C’est un physicien mondialement célébré pour avoir révolutionné la science avec sa théorie sur les infinis, une infinité d’infinis. A son chevet veillent son épouse plus jeune, Ursula, et ses deux enfants. D’autres aussi sont là : sa belle-fille, l’intendante et le jardinier, quelques invités de passage, un chien.  Et d’autres encore, ne sont pas loin : le dieu Hermès a endossé de bonne grâce le rôle de narrateur omniscient de cette histoire, tandis que son père Zeus a des vues sur la femme d’Adam – oui, le père et le fils s’appellent Adam, c’est pratique –, et cette femme se nommant Helen, on se demande si on ne va pas soudain débarquer à Troie. Le dieu Pan aussi est dans le coin.

Banville sans cesse gonfle les voiles de sa narration, il souffle sur les braises et fait jaillir des étincelles où on ne les attendait pas. Le mourant vogue dans ses souvenirs et chacun se prépare comme il peut à affronter le prochain deuil, tandis que les dieux vaquent à leurs propres desseins et que chacun s’interroge sur la réalité, l’amour et la mort.

Infinis a été un vrai grand plaisir de lecture !

« Cet amour, cet amour mortel, c’est une de leurs inventions, la chose que nous n’avons pas voulue, ni prévue ni approuvée. Comment ne nous fascinerait-elle pas ? Nous leur avons donné cette irrésistible compulsion dans les reins – Eros et Anankê, œuvrant main dans la main – à seule fin de pouvoir surmonter leur aversion mutuelle pour la chair et s’unir volontiers, plus que volontiers dans l’acte de procréation, car après les avoir lancés, nous n’avons pas eu le cœur de les laisser s’éteindre : après tout ils étaient notre ouvrage pour le meilleur ou, bien souvent, pour le pire. Mais voyez ! Voyez donc ce qu’ils ont fait de ce frotti-frotta. Comme si on avait donné quelques copeaux de bois et un seau de boue à un enfant pleurnicheur pour le tenir tranquille quelques instants et qu’en moins de deux il érigeait une cathédrale […]. »


John Banville sur le blog : La mer / Pour retrouver mes autres Mémoires d’acajou, c’est ici

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